Séminaire National de
Didactique des Mathématiques

14-15 janvier 2000
Paris

Les exposés ont lieu sur le Campus de Jussieu, Amphi 55B
2 place Jussieu, Paris 5ème

Résumés des exposés sur le thème de la preuve

Paolo Boero Université de Gênes

Entrer dans la culture des théorèmes

Entrer dans la culture des théorèmes signifie développer des compétences spécifiques inhérentes à la production de conjectures et à la preuve de ces conjectures en prenant en compte des éléments de savoirs théoriques. Des analyses épistémologiques et cognitives sont nécessaires pour sélectionner les éléments particuliers, essentiels, dans la production et la preuve des conjectures et les théories auxquelles les étudiants seront confrontés dans leur apprentissage. Par exemple, le rôle crucial de l'exploration dynamique (cf. Boero et al, PME-1996; voir aussi Simon, ESM-1996) de la situation problème dans la production et la preuve des conjectures doit être pris en compte; ceci peut aider à la sélection du "champ d'expérience" et des tâches dans lesquelles une telle dynamique est "naturelle" pour les élèves. De plus, ce phénomène d'une continuité (possible) entre la production d'une conjecture et la construction de sa preuve (voir Garuti et al, PME-1996, PME-1998) doit être prise en compte pour sélectionner les situations - problèmes dans lesquelles cette continuité se développera de la meilleure façon. Les théorèmes appartiennent à la culture scientifique (Vygotsky, "Pensée et language", Ch. VI); une médiation appropriée de l'enseignant est donc requise pour tout ces aspects sur lesquels il y a une rupture significative avec la culture du quotidien: la forme des énoncés, la structure des démonstrations comme textes, la nature des raisonnements permis, etc.

Julien Rolland Laboratoire Leibniz & IUFM de Grenoble

Illustration de la pertinence des mathématiques discrètes pour la modélisation et la distinction condition nécessaire/condition suffisante

Si l'on dresse un état des lieux de la présence des mathématiques dans l'enseignement secondaire, le bilan est un peu maigre. De manière provocatrice, nous pouvons même affirmer que le rapport de l'institution scolaire aux mathématiques discrètes est quasiment vide. Pourtant, au-delà du casse-tête qui peut se résoudre sans aucune technique et en deçà du problème de concours dont la solution démontre l'étendue d'une culture et la disponibilité d'un corps de savoirs, nous montrons que certains problèmes de mathématiques discrètes relèvent de techniques mathématiques simples.
  Notre travail prend pour point de départ une série d'études sur les savoirs que les problèmes de mathématiques discrètes nécessitent et qu'ils pourraient donc aider à développer, parce qu'ils nourrissent de nombreuses pratiques mathématiques. Une étude empirique relative au " rapport personnel aux mathématiques discrètes " de PLC2. Nous permet de révéler les liens confus entre condition nécessaire (CN) et condition suffisante (CS), la fragilité du rapport à la notion de preuve, l'incapacité à modéliser à nouveaux frais, sans s'appuyer sur des types canoniques " bien connus ".
  Nous poursuivons alors en retravaillant la notion de modélisation pour elle-même. Nous montrons en particulier comment l'activité de modélisation, pourtant fondatrice au plan scientifique, se réduit au mieux à un exercice de " traduction " d'un modèle &endash; dont l'énoncé fournit la description &endash; à un autre, dont l'établissement par " complétion " est seul à la charge de l'élève.
  Nous étudions donc également certains outils logiques du travail mathématique et notamment la distinction entre CN et CS, objets très clairement protomathématiques et de ce fait, non seulement jamais objet d'enseignement et rarement objet d'études didactiques. Il apparaît par exemple que, dans la logique effective de nombreux étudiants (les expérimentations concernent principalement le DEUG scientifique), on tient pour valide l'implication.
  Pour conclure nous montrons en quoi les trois thèmes de recherche que sont les mathématiques discrètes, la modélisation et la distinction CN/CS, ensemble a priori disparate, sont liés. La pratique de la modélisation (par contraste avec la " traduction "), engendrée par l'étude de " situations ouvertes ", active la distinction CN/CS par la nécessaire gestion de l'information. C'est en ce point que les mathématiques discrètes prennent leur importance : nous illustrerons, à travers une proposition de séquence didactique, le fait que les problèmes qui en relèvent sont de dévolution facile, en même temps qu'ils engendrent des situations ouvertes appelant une modélisation chaque fois renouvelée.

Viviane Durand-Guerrier
LIRDHIST & IUFM de Lyon

Logique et raisonnement mathématique : Variabilité des exigences de rigueur dans les démonstrations mettant en jeu des énoncés existentiels

D'une manière générale, dans les démonstrations mathématiques proposées aux étudiants, on trouve assez peu de références explicites à la logique classique. A contrario, on exige de ces mêmes étudiants un certain niveau de rigueur dans les preuves qu'ils produisent, ceci afin d'en assurer la validité.

Dans les travaux que nous menons avec Gilbert Arsac, nous examinons la question de l'articulation entre logique, rigueur et validité sous deux point de vue. D'une part du côté du praticien des mathématiques dans son rôle de professeur : par quoi, dans son discours auprès des étudiants remplace-t-il la logique absente ? D'autre part du côté de l'étudiant en mathématiques : comment, en tant que novice du domaine mathématique étudié, peut-il satisfaire aux exigences de rigueur qui permettent, en principe, de se prémunir contre les preuves non valides ?

Pour cette présentation, nous nous intéressons principalement à la première question. Nous appuierons nos réflexions sur un protocole obtenu en soumettant une démonstration de topologie comportant une erreur, proposée par un étudiant, à un certain nombre d'enseignants de mathématiques.